5-résistances


Je reste effaré de comment je ne cesse de me trouver des excuses, échappatoires, pour toujours repousser le retour à moi, même quand il s'agirait juste de ne m'accorder que quelques instants de vraie pause. Je sais, je vois, je sens combien la plupart de mes occupations quotidiennes de loisir ne font que cela, m'occuper. Au lieu de me nourrir. M'épanouir. Qu'elles ne sont qu'une fuite.

Mais une fuite de quoi ? Qu'est-ce que je cherche à fuir ainsi ?

Parlons de l'ennui. Cette étrange sensation qui survient quand "je ne sais pas quoi faire". Sous-entendu : quand je ne sais pas quoi faire d'autre que de me replonger dans des activités mobilisatrices d'attention cérébrale qui vont m'occuper intellectuellement un temps mais me laisseront au final aussi vide qu'avant, non rassasié, avec l'impression que j'aurai encore "perdu mon temps"... L'ennui en vérité est donc moins une quête d'occupation qu'une quête de complétude, c'est-à-dire de sentiment de véritable stimulation intérieure ! Le solitaire que je suis note que cela n'est pas lié à une activité extérieurement mobile. Je peux revenir frustré d'une balade dans la nature où j'ai été "dans ma tête" tout le temps, insuffisamment attentif sensoriellement à mon environnement, et totalement régénéré suite à une simple petite méditation dans mon salon, de reconnexion à mes ressentis ! Cela n'est pas lié non plus à une activité donnée. La même activité extérieure, par exemple regarder la télévision, pourra tout aussi bien être un passe-temps stérile qu'une source de réflexion ou d'inspiration positive, selon le type de l'émission et l'état d'esprit du spectateur. Chacun est capable de ressentir pour lui-même la différence entre ce qui simplement l'occupe, lui fait "passer le temps", donc ne mobilise que son intellect, et ce qui le stimule à un niveau plus profond de son être, lui apportant force et vraie joie.

Ainsi, finalement, le plus dur n'est pas tant de savoir accéder à ce mouvement intérieur que de le vouloir. Cela me fait tellement de bien quand je me l'accorde, même si ce n'est que quelques secondes par jour ! ... et pourtant je continue à chercher le plus possible à toujours en repousser l'opportunité. Cela me révèle cruellement combien l'engourdissement est puissant, la tentation d'y succomber facile... et en même temps, la perpétuation de mes chaînes certaine !

Il me faut donc d'abord aller jusqu'au bout de ce "dégoût" de moi-même, de cet assujettissement à mes faiblesses, que j'ai moi-même généré par mes choix de compulsion et d'addiction. Je peux voir tout ce qui ne me convient plus, tout ce que j'ai trop fait et vécu ou subi, je sens la voie à suivre, la direction du bout du tunnel, mais les habitudes ont la vie dure, elles cherchent sans cesse à me replonger dans les vieux schémas. Il me faut donc, petit à petit, générer une autre dynamique, patiemment, sans perdre l'objectif de vue. Ce n'est pas grave si les vieux schémas reprennent encore parfois le dessus, tant que je persévère à graver en moi courageusement de nouvelles habitudes. C'est un nouvel apprentissage, un nouveau Apprends-Tissage (tissage d'une nouvelle trame de vie pour atteindre l'apprenti sage).

Je ne peux tout changer du jour au lendemain, "petit à petit, l'oiseau fait son nid". Cet indispensable mouvement intérieur à recréer et laisser se déployer est tellement puissant qu'il nécessite une accoutumance, un apprivoisement. Je pressens que dans sa pleine force il peut tout balayer de mon ancien être, emporter toutes mes résistances et me transformer en profondeur... mais mon être n'est pas encore prêt ni adapté pour un tel afflux d'énergie. Je dois l'y préparer ; créer, aménager et garder propre le foyer en moi pour qu'il puisse s'y ancrer afin d'y flamboyer par la suite.

Concrètement, m'accorder chaque jour des moments de vraie nourriture : par le contact avec la nature, par la connexion avec le sens de ma vie, par des activités créatrices (l'écriture pour moi) ou des moments de détente inspirants et ressourçants (en musique ou lecture)...

Moins de zapping virtuel, plus de connexion au réel.

Moins de stimulations/excitations du mental, plus de descente au cœur et retour au corps.

Moins de pensées, plus de silence. Moins de penser, plus de ressentir !